Photographie: Patrick Taberna

Ma vie tangue entre le pull marine tout déchiré aux coudes et le train qui passe. Alors la nuit, quand je dors, elle s’en va voir Théodore et le cheval fourbu de Monsieur Ferré.  Foutue et cernée. Ce cri qu’on étouffe dans le silence de nos nuits où nos sanglots s’engouffrent, ne cessera-t-il qu’à coups de pilules et de mensonges ? Ma vie se chante.  Elle défile chaque soir dans mes écouteurs.
Et elle pleure.

Il faudrait que je lui dise à quel point je me sens vide, à quel point je suis une comédienne, une actrice usée de jouer le rôle de « Mme Tout va bien ». On s’ennuie tellement. Je ne sais pas d’où vient ce petit truc qui fait qu’on tient le coup, mais j’aimerais qu’il cesse de battre dans ma poitrine pour oser enfin vous quitter. Partir de bon cœur, sans regrets, ni hésitations. Ce serait l’idéal. Mais je ne peux les laisser, abandonner toutes les choses pour lesquelles je me lève le matin. Qu’elles soient absurdes, inutiles, insensées ou non, ces passions me tiennent toujours à cœur. Je me sens condamnée, éduquée pour aimer la vie et pour ne pas vouloir la quitter.. Prisonnière

« La seule raison qui nous interdise de nous plaindre de la vie, c’est qu’elle ne retient personne. »   Mon cher Sénèque, tu sais quoi ? Eh bien ce soir tu m’agaces… J’ai envie de me plaindre, point barre. T’es pas content ? C’est ton problème.

Photographie: Jeff Hahn

Ce n’est pas tous les jours facile de se raconter des histoires, de se dire que tout va bien. On refuse de sombrer à nouveau dans la folie des tourments, on préfère se mentir, on fait de son mieux ; Pas grand-chose en fait. On penche. On essuie quelques larmes et on repart. On avance dans ce tunnel qui ne mène à rien et on prit vainement d’être épargné. « Alors on danse ». On finira enterré sous une dalle de béton mais il paraît qu’il ne faut pas y penser. « Alors on chante ».

Photographie:  Ander Overgaard

« Avoir de la culture » - formule qui tombe de la bouche de ceux qui, généralement, n’en ont pas. Le mot « culture » est devenu presque inutilisable, sauf à raviver son étymologie végétale. Laissons à leurs illusions sociologiques ceux qui lisent « pour se cultiver ». Seules importent les oeuvres, ces rencontres manquées ou décisives. J’aime un livre, j’entre en conversation avec un esprit. Celui-ci m’enchante, m’irrite ou m’éclaire ; il me fait entrer dans un monde,  il change ma perception du temps. Quelle insulte faite à ce présent magnifique si je ne lisais que pour « l’avoir lu », pour « avoir de la culture » !